Immobilier & Digital. Article n°4 "L’immobilier entre dans une nouvelle ère digitale : 3 millions d’entreprises attendent d’être écoutées"

Plus j’avance dans cette série de tribunes, plus elle prend la forme d’un portrait chinois du marché immobilier. Peu transparent, l’information y circule encore mal, fort d’une main-d’œuvre nombreuse, beaucoup de tâches pourraient être automatisées…

Un portrait paradoxal, car ces contours sont ceux d’un secteur qui se porte bien. Interrogez n’importe quel professionnel sur la conjoncture, tous vous diront qu’ils vivent des très belles années. ‘Tout va très bien mon capitaine’! Alors pourquoi s’inquiéter ?

En fait, l’immobilier présente toutes les caractéristiques de ces marchés longtemps dominés par de gros industriels, sans jamais rencontrer de problème d’écoulement de la marchandise – si on peut appeler un immeuble ainsi. L’offre domine la demande au point que cette dernière, peu étudiée, prend des airs de nouveau continent encore à explorer.

Et le problème des marchés déséquilibrés est que lorsqu’ils basculent, les rapports de force et ses façons de fonctionner changent radicalement. Comme la banquise, au lieu de fondre petit à petit, ils peuvent se disloquer brutalement du jour au lendemain. Ici, c’est bien sûr la digitalisation qui élargit les fissures. De nombreux indices, parfois subtils, montrent cette méconnaissance des attentes du marché. Avez-vous remarqué que les professionnels parlent plus volontiers d’ utilisateur que de client? Les mots ont leur importance. Ou encore, faites ce test : demander à un investisseur qui est son client. Très rares sont ceux qui vous répondront les entreprises et non les fonds d’investissement. Ils oublient que les vrais clients finaux, ceux qui créent la valeur, sont les 3 millions d’entreprises qui paient les loyers.

Cette méconnaissance du marché entraîne des aventures aussi surprenantes que coûteuses.

Autre indice, plus concret : sur 3 millions d’entreprises en France, seules 450 ont un directeur de l’immobilier, soit 0,015%. Ces dernières ayant toutes plus de 100 sites en France, elles sont capables de faire entendre leurs besoins aux commercialisateurs, pas les autres. Sait-on seulement si elles sont satisfaites du fonctionnement du marché ? Faites-moi remonter vos informations sur le sujet, je ne connais aucune enquête là-dessus. Dernier exemple. Le rôle d’un directeur marketing est d’écouter les besoins de la demande et de les traduire en opportunité d’affaires. Or, combien sont-ils parmi nos leaders investisseurs, promoteurs ou commercialisateurs ? Ce poste est récent et encore rare dans l’immobilier. Chez BNPP Real Estate, leadeur du secteur, le premier directeur marketing a été nommé à la fin des années 2000. Là où d’autres secteurs comme la banque, l’assurance, les télécoms ont fait leur mue dès le début des années 90… Cette proximité de l’investisseur, du bâtisseur, au détriment du client ne vient pas de nulle part. Elle est parfaitement rationnelle du point de vue économique. Entre un investisseur qui distribue des mandats régulièrement et une entreprise qui déménage tous les 7 ans (en moyenne), le choix est vite fait : la rémunération de la commercialisation est plus élevée que l’accompagnement de la demande. Tout cela ne serait donc que littérature si cette méconnaissance n’entraînait pas régulièrement des mésaventures aussi surprenantes que coûteuses, comme la construction d’immeubles là où il n’y a pas de marché. Oui, vous avez bien lu. A Rennes, je me souviens de ce programme de 18.000 mètres carrés de bureaux qui ne trouvait pas preneur. Deux ans après sa livraison, malgré des mandats données aux commercialisateurs les mieux implantés de la région, il était encore largement inoccupé. Notre analyse a démontré que l’agglomération rennaise ne comptait tout simplement pas assez de grandes entreprises, ou alors qu’elles auraient dû toutes y déménager en même temps. Improbable. Il ne s’agit que de critères quantitatifs, on pourrait aussi parler de la qualité des locaux, plus difficile à cerner. Mais je pense que vous avez déjà compris où je veux en venir. Cet exemple extrême montre à quel point nous gagnerions à mieux connaître notre marché. En clair, à donner la parole à nos clients, tous nos clients. Ce ne sera pas simple. Ecouter les besoins de millions d’entreprises et locataires exige des méthodes radicalement différentes, où data et automatisation auront toute leur place, quand notre culture professionnelle valorise le contact humain, le terrain, et le réseau personnel. Et vous, quelles sont vos solutions ? Par quels moyens capitaliser sur l’expertise des anciens pour ne pas se laisser distancer par des nouveaux ? Likez, commentez, partagez ce texte pour poursuivre cette conversation sur LinkedIn.

Blaise Heurteux, associé-fondateur de HBS Research-La Place de l’Immobilier

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